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Movado, une histoire horlogère mouvementée

Movado, une histoire horlogère mouvementée Des montres en mouvement

Lorsqu’on aperçoit des modèles Movado au travers de la vitrine d’une boutique de montres, on peut tourner la tête, sans avoir conscience du riche passé de cette marque et de sa contribution conséquente à l’horlogerie. Dans cet article, nous nous replongerons dans les temps forts des 150 années d’histoire de la marque en mouvement.

L’établissement de l’entreprise Movado

Achille Ditesheim et sa famille sont arrivés à La Chaux-de-Fonds en 1876 pour fuir la guerre Franco-Prussienne et pour poursuivre leur rêve de créer une entreprise de montres. La Chaux-de-Fonds, ça vous dit quelque chose ? C’est bien normal ! Ce village du Jura suisse est reconnu pour son rôle central dans l’industrie horlogère et sera même qualifié de « ville manufacture » créée pour et par l’horlogerie suisse par Karl Marx dans Le Capital. À partir du milieu du XVIIIe siècle, les horlogers se spécialiseront dans l’art de la pendule en suivant les traces de Daniel Jean Richard, horloger mythique autodidacte, considéré comme le fondateur de l’industrie horlogère dans le Jura et qui serait à l’origine du système de l’établissage dans le canton de Neuchâtel. Encore aujourd’hui, la ville de La Chaux-de-Fonds fait prospérer son héritage horloger avec de nombreuses manufactures telles que Breitling, Cartier, Girard-Perregaux, TAG Heuer et bien d’autres !

Mais revenons-en au jeune Achille Ditesheim, qui à seulement dix-neuf ans, et tout juste finissant ses études d’horlogerie, ouvre une boutique de montres dans le village de La Chaux-de-Fonds en 1881. Au début, cette boutique ressemble plus à un établi discret dirigé par Achille mais ses frères rejoignent vite l’aventure. En 1890, l’entreprise devient « L.A.&I. Ditesheim, fabricants » reprenant les initiales des trois frères Léopold, Achille et Isidore, et se transforme en usine avec pas moins de 80 employés en 1897 ! A cette époque, Movado figure dans le top 3 des entreprises horlogères en terme de nombre d’employés avec Jaeger-LeCoultre et Audemars Piguet. L’entreprise commence par assembler des mouvements provenant d’autres manufactures pour les emboiter dans des montres de poche.

Il faudra attendre 1905 avant de voir le nom « Movado » apparaitre sur certains modèles. Movado signifie « en mouvement » en Esperanto, qui fait écho à l’esprit innovateur de la marque.  L’entreprise est notamment une des premières à investir dans les mouvements électriques, ce qui rendit l’entreprise plus productive. Grâce aux nouvelles machines, Movado peut enfin fabriquer ses propres composants pour leurs mouvements – ce qui fut une étape cruciale dans l’histoire de la marque !

Les premiers modèles à succès de Movado

En 1912, la Polypan fut la première montre à succès de Movado. L’idée derrière cette innovation vient d’Isidore Ditesheim qui voulait créer une pièce d’horlogerie épousant la forme du poignet. Le mouvement est alors composé de plusieurs couches d’où le nom de la montre, pour pouvoir incurver le mouvement qui obtiendra le Brevet n°60.360. Cette pièce est très recherchée par les collectionneurs à la vue de sa production limitée à environ 1500 exemplaires, avec des modèles en or 18 carats ou 14 carats ainsi qu’en argent, avec ou sans petite seconde.

Le Polypan fut suivi de la Curviplan à partir de 1931, qui était une version un peu plus contenue et fine que la Polyplan.

A partir de 1912, Movado se fera également un nom en équipant les soldats pendant la Première Guerre mondiale d’une montre avec une pièce en métal qui servira à protéger le verre. Cette pièce est percée et permet ainsi la lecture du temps dans les tranchées.

Ermeto, montre de poche RÉVOLUTIONNAIRE

Il est normal que l’Ermeto vous dise quelque chose, c’est l’un des modèles les plus connus de Movado, que vous avez pu découvrir dans l’article  Movado Ermeto : la fabuleuse histoire de la montre Movado Ermeto. L’Ermeto, sorti en 1926 permettait à son propriétaire de voyager en toute liberté et sans soucis car le boitier était hermétiquement scellé recouvert d’un habillage en métal, souvent embelli par une couverture en cuir, exotique ou non. Un an après sa sortie, Movado ajoute une touche extrêmement novatrice car le mouvement peut désormais être remonté grâce au système d’ouverture et de fermeture du boitier, se rapprochant ainsi d’un mécanisme de montre automatique. En ouvrant et fermant l’Ermeto 3 ou 4 fois le mouvement était ainsi remonté pour la journée !

Movado Ermetophon - Sélection de montres vintage Joseph Bonnie
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Un calendrier à portée de poignet, les Calendrograf & Celestograf

Movado conçut son triple calendrier sous le nom de Calendograf en 1938, et en fera la production jusqu’en 1954. Le calibre 475, dérivé du mouvement Movado 470, affiche les heures, les minutes, les secondes dans un sous-cadran, le jour de la semaine et le mois avec des guichets et enfin la date du mois avec une quatrième aiguille.

Le Celestograf ajoute une complication phase de Lune au Calendograf. Produite entre 1947 et 1954, elle sera également alimentée par un dérivé du calibre 470, le calibre 473 à remontage manuel et opérant à 18,000 alternances par heure.  Le Celestograf aura un look un peu plus “luxueux” reconnaissable à ses longues cornes courbées et arrondies. La version automatique avec le calibre 200 fera son apparition en 1948 sous le nom Calendomatic.

Entre 1945 et 1950, Movado réutilisera les avancées des modèles Calendograf et Celestograf pour sortir la Calendarmeto, soit l’Ermeto avec des complications additionnelles :  la date, le mois et la phase de lune.

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Movado Calendermeto chez Christies

Des petites pépites d’innovation

Les frères Ditesheim étaient des précurseurs de l’horlogerie avec pas moins de 98 brevets déposés entre 1900 à 1969 ! Un des brevets sera attribué à l’Acvatic, sortie en 1935, qui sera la première montre étanche de Movado avec son boitier décagonal vissé avec un joint de plomb et un joint en liège pour le remontage de la couronne. Un autre brevet correspondra à la première montre automatique de Movado, la Tempomatic brevetée en 1943 mais sortie en 1945.

En 1950, Movado lancera le Polygraph World Time avec son calibre 129 breveté lui aussi, reprenant le calibre 125 avec une fonction GMT et dans un boitier de 37 mm, avec une lunette tournante fine mais facile à saisir. En tournant la lunette, vous pouviez faire correspondre le fuseau horaire de la ville souhaitée avec l’aiguille 24 heures à l’extrémité rouge en forme de croissant de lune.

En 1959, Movado change son logo pour s’approprier la lettre « M », comme sur cette superbe Sub-Sea 50 à remontage manuel des années 1970, ou encore cette belle Kingmatic Movado mécanique à remontage automatique datant des années 60.

Movado Sub-Sea 50 - Sélection de montres vintage Joseph Bonnie de novembre 2023

Les Chronographes Movado

Les chronographes M90 et M95 sont introduits vers la fin des années 1930… mais comment les distinguer? C’est simple, au nombre de sous-cadrans ! Le M90 fut produit entre 1938 et 1965, et possède deux sous-cadrans, avec deux boutons poussoirs alors que le chronographe M95 fut produit à partir de 1939, et possède trois sous-cadrans, ajoutant un totalisateur des 12 heures du chronographe. Le mouvement M95 sera monté dans les montres Movado jusqu’au début des années 1970, jusqu’à la collaboration avec Zenith qui débutera à la fin des années soixante – nous y reviendrons !

Movado faisait aussi preuve d’originalité avec les aiguilles des M95 dites « serpent » dû à la forme serpentine des aiguilles utilisées dans les sous-cadrans.

Vous pourrez aussi croiser le M95 avec le sigle de l’armée Norvégienne avec un cadrant argenté, un boitier d’une dimension de 35.5 mm, signé François Borgel, nous y reviendrons aussi… soyez patients!

Si vous voulez en savoir plus sur les chronographes Movado, je ne peux que vous recommander la vidéo portant sur la mise aux enchères d’un chronographe Movado exceptionnel référence 19008 examiné par Nicolas.

Movado chronographe 19008 - Auctie's 3 novembre 2023
Movado chronographe 19008 - Auctie's 3 novembre 2023

Le partenariat avec François BorgeL

Comme le raconte Nicolas dans la vidéo, Movado va s’associer à l’entreprise François Borgel pour le design de ses boitiers à la fin des années 30. Le design des boitiers François Borgel est très distinctif, et en cas de doute, vous pouvez vous fier aux initiales F et B au-dessus de la clef de Genève qui figurent sur les boitiers.

Movado chronographe 19008 - Auctie's 3 novembre 2023

Une petite parenthèse est nécessaire pour présenter François Borgel qui confectionnera un boitier vissé pour rendre les montres étanches en 1891, utilisé alors par IWC, Longines ou encore Rolex. En 1924, la société François Borgel fut reprise par la famille Taubert installée au Locle, ville horlogère voisine de La Chaux-de-Fonds. Sous la gouvernance de la famille Taubert, F.B commercialisera à la fin des années 1920 des boitiers avec un fond vissé et un joint en liège, qui sera alors utilisé par Mido, Vacheron Constantin ou encore Patek Philippe ! La première collaboration entre Movado et F. Borgel naitra en 1935 et apparaitra d’abord en 1939 avec le chronographe 90M, qui a des allures de son chronographe frère Patek Philippe référence 1463.

Zenith & Movado, deux maisons horlogères au passé entremêlé

La collaboration entre Movado et Zenith verra le jour en 1969 alors que les deux marques sont possédées par le groupe Mondia Zenith Movado Holding (MZM). La même année où sortira le célèbre premier chronographe automatique à haute fréquence El Primero en 1969. Le mouvement El Primero Zenith 3019 PHC était composé d’un oscillateur « à haute fréquence », l’un des rares mouvements fonctionnant à 10 Hz (36 000 alternances par heure). Cette fréquence lui donne la précision d’un dixième de seconde sur l’aiguille centrale du chronographe (!). Pour en savoir plus sur l’histoire du El Primero, je vous recommande de dévorer le passionnant article qui s’y consacre.

Cette collaboration entre Movado et Zenith durera jusqu’en 1984, 15 années durant lesquelles Movado et Zenith opèreront sous le même nom. Pendant cette collaboration, les montres Movado embarqueront le mouvement Zenith “El Primero” 3019 dans la Datron HS 360, avec les mêmes caractéristiques, la seule différence étant que le guichet de date est placé à midi sur la Datron HS 360 alors qu’il se trouve entre 4 et 5 heures sur le modèle Zenith. En échange, Zenith était autorisé à utiliser les mouvements Movado calibres 405 et 408 ainsi que le design de la Museum Watch.

Pour la petite anecdote, le design de la Museum Watch fut inventé par le designer industriel Nathan George Horwitt en 1946, inspiré par le mouvement Bauhaus, avec un simple cadran noir sans chiffres ni index, et un rond doré à 12 heures représentant le soleil. Le design fut adopté pour un cadran de montre en 1947 par Vacheron Constantin, et Jaeger-LeCoultre! Movado en fera une production en série un an plus tard, en 1948 et avait dû alors versé un paiement rétroactif pour l’usage du design. La montre reçut son nom après avoir été sélectionnée par le Museum of Modern Art de New York, le MoMa, pour sa collection permanente en 1959.

Comme beaucoup, Zenith & Movado ont souffert de la crise du quartz, et en 1978 la décision est prise de ne produire que des montres à quartz – ce qui ne sera pas synonyme de succès pour les deux marques.

Le groupe NAWC (North American Watch Corporation) qui fut fondé en 1965 par Gerry Grinberg, un des plus grands distributeur horloger sur le sol américain notamment de Piaget, acquit Movado en 1983 et adaptera le nom de l’entreprise pour « The Movado Group ». Zenith restera sous le Group Dixi jusqu’à ce que l’entreprise soit acquise par LVMH en 1999. Ainsi se termine la collaboration entre Zenith et Movado.

Mais qu’en est-il de Movado aujourd’hui?

Depuis la crise du quartz et l’acquisition de Movado par Gerry Grinberg en 1983, Movado va mal. En 1988, Grinberg essaie de relancer Movado avec cette formule “magique” de s’associer à un artiste pour créer un nouveau modèle qui connaitrait le même succès que la Museum Watch. Grinberg fait alors appel à son ami Andy Warhol pour la montre Times 5 qui sortira de façon posthume en 1987. La Times 5 est composée de cinq montres distinctes, d’où le nom de la montre,  qui se relient pour former un bracelet. Chacune d’entre elles présente une photo du paysage New-yorkais en noir et blanc sur le cadran, qui fait écho à la fascination de Warhol pour la photographie et les objets de tous les jours. En soit, une façon très artistique de représenter la GMT avec cinq zones!

Les années qui suivirent, Movado s’associera avec de nombreux artistes pour créer des montres au design artistique, comme Max Bill, Romero Britto et Alexis Lubomirski. Malheureusement ces tentatives de s’associer à des artistes ou encore de relancer les modèles historiques avec la collection « Héritage» demeurent des opérations marketing, des coquilles vides, et non une vraie volonté de retrouver l’amour des passionnés, mais plutôt leur portefeuille ! Le catalogue actuel n’est autre qu’une ribambelle de montres de qualité pauvre, en majorité à quartz.

Notre souhait de voir Movado renouer avec son héritage et ADN innovateurs qui autrefois la plaçait côte à côte avec les plus grandes maisons horlogères semble pour le moment naïf et lointain, et nécessiterait pour la marque suisse de faire honneur à son nom et de se mettre en mouvement !

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