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Les montres s’invitent au restaurant

Les montres s’invitent au restaurant Episode 1 : Capitaine

Dans la continuité de notre série  “Les montres s’invitent au restaurant” où nous évoquons le lien indéfectible entre les Hommes et l’horloge qui rythme le tempo lors de nos moments festifs à table, nous avons eu l’occasion de pouvoir interviewer quelques acteurs du milieu, pour mieux comprendre leur rapport à cet écoulement de minutes, parfois si précieuses.

Je ne peux m’empêcher ici de sortir la citation d’un certain et éminent Mc Solaar disant “Qui sème le vent, récolte le tempo !” pour vous présenter ce restaurant. Ici, ce n‘est pas d’un quelconque karma ou d’énergie négative en tout genre dont je vais vous parler mais d’un restaurant qui navigue entre averses et éclaircies avec panache.

Tout commence non loin de la fameuse et plus ancienne place de notre capitale : la Place des Vosges, qu’amarre le restaurant Capitaine. Restons encore un peu dans cet esprit marin sans vous faire un mauvais jeu de mots autour de l’andouillette, en vous emmenant dans cette impasse à l’empreinte paisible comme une “mer d’huile” dénommée Guéménée. Endroit où une équipe dans un style matelot à la démarche farouche s’attèle. Coïncidence ? je ne pense pas, le nom nous met dans le bain de manière naturelle en nous renvoyant vers la région du propriétaire des lieux, la Bretagne.

Porte poussée, c’est sur une décoration non pas “léchée”, comme pourraient se targuer certains établissements, mais plutôt une ambiance pêche, où les objets en tout genre comme livres, tableaux et autres sculptures ornent les lieux, nous donnant le sentiment d’être dans une vitrine de souvenirs.

Souvent, l’un des premiers visages que vous voyez en entrant est celui d’Olivier, belge né dans les années quatre-vingts-dix, qui est le responsable de salle, c’est ce passionné de musique et surtout de vin qui nous accueille pour nous diriger vers notre table.

Je ne viens pas d’une famille de restaurateurs, mais mon oncle et quelques cousins évoluent dans ce milieu, donc depuis l’âge de quinze ans lors de mes week-end et mes boulots d’étudiant, je n’étais pas loin de l’univers, du coup quand je suis arrivé à Paris il y a six, sept ans ce choix de carrière était la suite logique des choses.

Olivier

Un service décontracté, une ambiance comme à la maison se dégage du lieu nous offrant sous nos yeux un spectacle visuel comme olfactif, les assiettes font leur entrée en temps et en heure et s’enchaînent par vagues.

A l’œuvre de ces mets, un Vitréen : Baptiste. Cet original sans prétention à l’enthousiasme et l’énergie débordants essaye toujours (avec succès) de s’adapter à vous, mais aussi à son équipe, un équipage bien hétéroclite et bien rodé. Que dire de son parcours ? Il a fait ses armes à l’Agapé, l’Astrance, l’Ambroisie et le Servan, des maisons à la belle réputation.

Un rouage humain

“ Il n’y a pas de chef ici, il n’y a que des gens qui travaillent !” Cette phrase de Baptiste me marquera toujours autant, elle fait comprendre qu’un restaurant n’est pas qu’une seule personne mais bien un groupe, même si les grades et les positions peuvent effectivement être bien ancrées, seuls les plus fous et égoïstes penseront que le succès se fait seul. Comptant sur le travail minutieux des uns et des autres, ces personnes participent à cet engrenage vivant, qui sans nous rappeler certaines manufactures horlogères, nous font réaliser le temps passé de toutes ces mains sur nos précieuses montres. Les voyant la plupart du temps dans leurs missions, c’est avec un peu de gêne qu’on n’ose les interrompre, les privant peut-être de quelques minutes cruciales à leur tâches lorsque l’on voit leurs montres à leur poignet.

Pendant que nous prenons notre temps dans cette navigation culinaire, eux se hâtent, essayant de maintenir la barre et c’est lorsqu’on leur pose la question de leur rapport au temps, qu’on découvre secrets et réalités sur les dessous de leur domaine, souvent abstrait pour les non initiés de cette course à la minute.

Je suis quelqu’un d’assez ponctuel, je n’aime pas être en retard, ni même être en avance, j’aime bien être juste à l’heure. J’emmène mon petit à l’école à 8h20, à 8h45 je suis au restaurant, le café en train de couler, les gars arrivent dans les alentours de 9 heures, le service se passe entre midi et 14h30, à 16h30 je retourne chercher mon fils pendant la coupure, à 18 heures ma compagne arrive et prend le relais puis je retourne au resto etc… En cuisine j’essaye de ressentir le temps par exemple quand je mets une viande, je ne mets pas forcément de minuteur, c’est plus un ressenti, c’est particulier à expliquer, je vais aller la voir, je vais jauger le temps qui reste.

Baptiste

Baptiste possède un regard différent sur le temps, ajoutant que c’est l’expérience au fil des années qui lui a intégré un minuteur dans le cerveau. Pour les cuisiniers moins serein, le minuteur reste encore leur meilleur allié. Sonnant à la fin d’un temps de cuisson ou autre, il rythme chaque actions de ces derniers, ne brisant pas leur organisation

A l’inverse, en salle, Olivier, remplaçant la baguette d’un chef d’orchestre par son limonadier de service, nous raconte sa perception et son rapport au temps.

Il y a les dix minutes universelles pour tous, mais pour nous ça n’existe pas. Sur chaque table le temps est différent, pour certains dix minutes d’attente pour un plat peut sonner comme une heure, à contrario une table qui prend son aise et du plaisir, une heure peut défiler en dix minutes. Le passe (lieu entre la cuisine et la salle où transitent les plats) nous fait office de témoin, on note et on barre l’heure comme une sorte d’archive de la table, au cas où. Tu as aussi les personnes du midi qui te disent aussitôt assis “ne partez pas ! On va faire entrée-plat, une carafe d’eau et pas de vin s’il vous plait” là on le sait, il sont dans le rush et on va s’adapter à eux. Il y a aussi les tables à renouveler dans un cas de double service, une première table a un temps donné pour manger puis s’en suit une autre juste après. Ce changement peut être stressant, nécessitant une coordination bien calculée pour éviter les embûches.

Olivier

Grand seiko snowflake SBGA211

Nos horlogers ont la blouse de travail, les restaurateurs eux ont un tablier bleu et une chemise blanche retroussée. On ne peut la louper ! A chaque assiette posée, on remarque sur son poignet une montre et pas des moindres : une référence dite”Snowflake” de chez Grand Seiko ! Le modèle SBGA211G bien connu de la scène. Devenu iconique à sa sortie il y a presque vingt ans avec son cadran texturé où la maison nippone adepte d’inspiration de son patrimoine naturel, reprend la montagne enneigée de Hotakadake, situé entre Takayama (dans la préfecture de Gifu) et Matsumoto (dans la préfecture de Nagano) comme influence. Une montre technique à l’allure sportive et habillée animée d’un mouvement Spring Drive 9R65. Elle arbore des aiguilles dauphines et des index facettés au polissage éclatant grâce à la technique Zaratsu gardée secrètement par la maison. Puis-je en dire autant du reste ? Le bracelet et le boitier nous montrent une foule de micro-rayures dans tout les sens, signe du vécu de son porteur.

Si je devais faire attention toutes les deux secondes à l’état de ma montre je deviendrais fou. J’avoue que la première rayure fait toujours son petit effet. Pendant le service aucun pépin, mais au moment de la mise en place, lors de ma remontée de cave par exemple, on se cogne dans tout les sens. C’est ma montre et je ne compte pas m’en séparer.

Olivier

A vingt-et-un ans pour son anniversaire, il reçoit la Breitling de son père, une montre qu’il apprécie toujours beaucoup. Quelques années plus tard, dans un bar où deux autres personnes ayant la même montre lui mirent la puce a l’oreille : après vérification du numéro de série sur divers sites le résultat tombe, il s’agit d’une fausse montre. Il nous confie qu’à la base il hésitait avec une Rolex explorer I, mais qu’en poussant la porte d’à côté, Place Vendôme chez Grand Seiko, il fut reçu comme un prince avec un service d’exception qui le mit à l’aise pour essayer dans les meilleures conditions les différents modèles. C’est sur des critères de simplicité, de discrétion et de finitions abouties, que la Snowflake s’imposera naturellement.

Je te laisse imaginer ma déception lorsque je réalise que mon père m’a donné une fausse Breitling, je pense que lui-même n’était pas au courant. C’est vraiment à partir de ce moment là que j’ai commencé à m’intéresser plus sérieusement aux montres. Avec la trentaine qui arrivait, j’ai décidé de me faire un joli plaisir.

Olivier

Le comble de ce premier épisode comporte déjà une particularité pour le poignet du chef Baptiste où la montre est… absente !

C’est vrai que je ne porte pas de montre, je ne trouve pas ça pratique, j’ai les mains souvent mouillées ou au contact du produit, je trouve pas ça forcément hygiénique. Je regarde l’heure ailleurs en cuisine, c’est sur cette unique horloge Braun digital que nous regardons l’heure.

Baptiste

En revanche il nous a ramené les objets du temps, qui l’entourent. Notamment son réveil Braun X Off White, modèle AB1 dessiné par le designer allemand Dietrich Lubs dans la fin des années 1980, repris récemment par le célèbre créateur de mode Virgile Abloh ajoutant une touche plus minimaliste au coloris tape-à-l’œil et une Flik Flak bleu avec son bracelet au motif de baleine, cette montre que nombre d’entre nous on eu pour apprendre à lire l’heure à nos débuts. Montre qu’il a également eu étant plus jeune mais c’est celle de son fils qu’il nous présente avec joie. Pour un père dont chaque instants est millimétré, voila que c’est son fils dont le temps est encore subjectif qui porte une montre. Une situation d’un genre burlesque je trouve, donnant ainsi un paradoxe sur celui qui porte le temps.

C’est une montre que j’ai eu petit et que j’ai offert à mon plus grand garçon. Le plus drôle c’est son petit frère âgé seulement de deux ans, qui lui pique pour la mettre à la crèche surprenant toujours l’éducatrice.

Baptiste

Qu’ils soient en cuisine ou en salle, Baptiste et Olivier nous ont livré leur relation au temps qui est structuré de manière drastique mais pas seulement. Un aspect humain s’invite dans l’équation donnant une souplesse à la rigidité du milieu. Leur laissant peu de temps à eux, ils en ont quand même pris pour le partager avec nous. Dans notre prochain épisode, traditions et nappes blanches seront de mise dans un restaurant se trouvant dans une rue discrète du Marais.

Une réponse à “Les montres s’invitent au restaurant”

  1. Eliott dit :

    Super cet article, ça m’ a donné envie d’aller au restaurant. Cette immersion dans cet univers a été parfaitement écrite au point de me transporter de mon bureau à la place Vendôme !

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