Réflexion : Ces marques qui mériteraient la renaissance du phœnix Universal Genève, Nivada, Wittnauer et tant d'autres

Réflexion : Ces marques qui mériteraient la renaissance du phœnix Universal Genève, Nivada, Wittnauer et tant d'autres

Ce contenu a été mis à jour le 18/04/2020

Alors que nous sommes (pour la grande majorité) chez nous, quoi de mieux que de remettre au goût du jour cet article sur les marques qui mériteraient un retour digne ? Un article non-exhaustif vous vous en doutez, n’hésitez pas à apporter votre pierre à l’édifice.

Universal Genève, Nivada, Wittnauer, Mathey-Tissot. Autant de marques qui nous font vibrer aujourd’hui et pour lesquelles nous portons un intérêt grandissant, tant leur histoire et leur passé de design, de mécanique, de fonctionnalité et d’histoires d’hommes est riche. Malheureusement, on ne peut que déplorer ce qu’elles sont devenues aujourd’hui, elles qui représentaient si haut les valeurs que nous défendons au quotidien.

Évidemment, si ces marques ont subi cette évolution, ce n’est pas à cause de ceux qui un jour les ont fait briller, vous vous en doutez. Mais souvent suite à un ou de nombreux rachats successifs. L’essence a fini par se perdre et la magie par s’évaporer, pour aujourd’hui se retrouver bien loin, très loin de la superbe qu’elles ont un jour connu… On se pose aujourd’hui la question du pourquoi.

Posons le problème

De nombreuses montres aujourd’hui vintage font vibrer la corde sensibles des amateurs d’horlogerie comme des béotiens. Parmi les noms estampillés sur les cadran et les mouvements, des marques ont évidemment disparu du marché comme de notre champs de vision. Une crise du quartz, une liquidation, toutes les raisons existent. Mais d’autres marques ont connu une évolution bien différente et ne se sont jamais vraiment éteintes, continuant encore aujourd’hui de produire des montres. D’une manière différente.

Souvent, les noms de marques qui se sont éteintes ont été rachetés, par des fonds d’investissement ou des particuliers souhaitant investir de l’argent et vendre quelques montres au passage. Malheureusement, c’est lors de ce moment de transition que bien souvent l’identité et l’ADN de la marque s’en sont allés, et que l’on observe alors des marques iconiques par le passé devenir neutre ou pire n’avoir plus aucun rapport avec le passé glorieux et l’horlogerie. Pour devenir de simples accessoires sans fond, ni forme, ni aucune âme.

Que s’est-il passé ?

La marque et son ADN

Vous pourriez rétorquer que : “Aujourd’hui, de nombreuses marques des groupes de luxe ne ressemblent plus à ce qui a fait leur gloire par le passé”, ce à quoi je répondrais la chose suivante. En effet, des marques de grands groupes, et pas seulement, ont vu leur proposition de produit changer très largement. Oui, mais. Elles n’ont souvent pas perdu la chose la plus importante : leur ADN, la divine substance qui anime leurs montres. Omega a toujours sa Speedmaster, Audemars Piguet sa Royal Oak et Panerai son pont protège couronne.

Certes les pièces se sont modernisées, elles se sont parfois épaissies, leurs finitions ont évolué, leur prix aussi.. Mais elles sont toujours reconnaissables par leurs éléments de design caractéristiques, leur âme et un je ne sais quoi, comme faisant intégralement partie d’une identité de marque, quoi que l’on puisse en dire. Dans le pire des cas, quand des pièces qui n’ont rien à voir avec le passé, d’autres collections de la même marque sont là pour le rappeler.

Et puis il y a les marques qui n’ont plus rien, ou très peu, à voir avec un riche passé.

Nous pensons par exemple à Universal Genève, à Nivada, Wittnauer ou encore Mathey-Tissot.

La cas Universal Genève

Pour moi, le “moins pire” des exemples. Nous en parlions encore il y a quelques semaines en vous présentant la superbe Universal Genève Compax Nina Rindt, je ne vais pas vous refaire la belle histoire d’Universal Genève, mais il faut retenir que l’entreprise reste familiale jusqu’en 1967, année où elle est rachetée par le groupe Bulova avant d’être vendue en 1989 au holding de Hong-Kong Stelux. Au passage, Stelux possède également Cyma et Solvil et Titus… De l’or en barres.

Stelux est un fond d’investissement créé au début des années 1960 dont l’objectif était l’exportation et la fabrication de composants horlogers en acier vers l’Europe et le Japon.

Depuis l’édition 2009 de Baselworld, le site n’est plus mis à jour, et les nouveautés se font toujours attendre. Si j’ai dit un peu plus haut “moins pire”, c’est que les mouvements, notamment le micro-rotor, peuvent encore susciter un intérêt. Mais les montres n’ont rien de l’âme Universal Genève tout en étant pas laides non plus. L’identité de marque s’en est allée, et les amateurs d’horlogerie ne comptent plus les moutons pour s’endormir mais imaginent qu’un beau jour Universal soit cédé et que le nouveau propriétaire fasse les choses bien.

L’attente, quelle serait-elle ? Reprendre l’entreprise pour faire vivoter la marque ? Là n’est pas le souhait. L’attente se trouve plutôt autour d’un investisseur passionné qui saurait reproduire sans exagération l’esprit d’Universal et des pièces qui ont fait sa gloire. Afin de ne pas sombrer dans le passé mais conserver un vrai ADN de marque. Je pense bien évidemment à la Polerouter mais aussi et surtout aux chronographes de folie qui sont sortis des ateliers. Sans compter un oeil toujours tourné vers la collection et la création d’un musée et d’une section d’archives.

Le cas Nivada

Les exemples de marques comme Nivada ou Wittnauer sont à nos yeux encore plus consternants.

La marque Nivada que l’on connaît tous pour sa belle Chronomaster ou sa très particulière “Pac-Man” a été rachetée au début des années 2000 par le groupe mexicain Salinas, conglomérat formé de nombreuses entreprises de radio, de télévision, de clubs de football, j’en passe. Mais visiblement les designers horlogers ne font pas légion en regardant rien qu’un quart de seconde les pièces que propose Nivada aujourd’hui et distribuées largement au Mexique.

Les pièces n’ont plus rien à voir avec de l’horlogerie, le site présente l’histoire de la marque en 5 lignes et surtout, les montres portent des noms invraisemblables, où la Moonmaster devient un chronographe marin et la “Millionaire” une montre hybride né de l’accouplement entre une Omega Constellation et une montre offerte dans l’abonnement d’un magazine quelconque.

Il s’agit simplement d’un fond d’investissement ayant vu l’opportunité d’utiliser un passé suisse et le nom “Swiss” pour vendre des montres à un marché sur lequel elles trouvent un écho favorable. Sans compter que “Nivada” possède évidemment la consonance pratique dans un pays d’Amérique Centrale. De acuerdo.

Si vous avez ouvert les yeux ces dernières semaines, vous avez peut-être remarqué qu’il se trame quelque chose du côté de Nivada. Un nouveau compte Instagram, quelques images 3D et la prise en compte de remarques des abonnés. Une reprise totale ou un achat de nom partiel ? Un projet qui verra le jour rapidement ? Un résultat satisfaisant ? Autant de questions qu’il est juste de se poser.

Le cas WITTNAUER & CO

Notre chère marque Wittnauer a connu une suite différente. Si vous souhaitez en connaître plus sur son histoire et un chronographe de référence, j’ai nommé le 242T, nous en parlions il y a quelques semaines.

Après s’être faite absorber par le groupe Bulova en 2011, c’est chez Citizen qu’elle finit, car le groupe Bulova a été acquis par Citizen en 2008. Un long chemin. Le site de Wittnauer n’est plus en maintenance comme il l’a été un bon moment déjà, et une simple visite sur le site permet de comprendre tout l’enjeu de cet article et la réflexion adjacente. Wittnauer est aujourd’hui lui aussi très loin d’une once d’âme horlogère. Tout est à faire.

Comme je le disais en introduction, quelques marques me sont venues à l’esprit comme grands exemples et porte-étendards de cette renaissance que l’on souhaite tous. Mais cela cache évidemment une forêt d’autres marques qui trouveront toujours un public averti ou un public d’intérêt.

Parmi ces marques, une retient particulièrement mon attention : Mathey-Tissot. Car il s’agit à la fois d’un exemple et d’un contre-exemple. Un contre-exemple car la marque est encore aujourd’hui indépendante et la production se déroulerait toujours en suisse. L’emploi du conditionnel est important ici, les informations à ce sujet étant rares. Pas de rachats donc, pas de délocalisation. Mais un exemple au regard des modèles présentés. On sent de la bonne volonté derrière des modèles comme la 1886 ou le Type 21.

Oui, mais la réalisation et les finitions ne sont pas là, et l’esprit très partiellement. Le pire arrive à la vue d’une “Rolly Vintage Quartz” dont je vous laisserai découvrir les images. Sérieusement ? Une “Rolly” sur base de Submariner qui aurait fait un enfant à une GMT-Master et gardé uniquement la lunette. Je préfère ne pas faire de commentaires.

Chers amis, tout cela est bien triste. Il est triste que des marques aussi prestigieuses autrefois et qui le sont encore dans nos coeurs aujourd’hui finissent par devenir malgré elles des productrices d’accessoires (pour ne pas dire montres) qui n’ont plus même une dose d’esprit horloger. Face à cela, espérons que le temps trouvera raison, et que ceux qui font aujourd’hui tourner ces entreprises vendent leurs affaires à des particuliers ou groupes de particuliers passionnés qui sauront les directions à prendre et les stratégies à entreprendre pour rendre un hommage mérité à leur grand passé et ainsi préparer un véritable futur riche de sens, de designs intelligents et proche des amateurs qui la chérissent.

On dit souvent qu’on ne peut écrire son avenir de façon brillante que lorsqu’on comprend vraiment son passé. Un concept à méditer et à intégrer pour tous ces repreneurs de maisons horlogères qui ont la chance d’avoir une histoire. Le syndrome égocentrique de l’homme d’affaire ou du designer à qui l’on confie la sainte tâche d’insuffler la vie, qui consiste à faire table rase du passé est sans doute l’un des plus grands drames de l’horlogerie moderne. A croire que la magie nécessite un soupçon d’humilité, celui d’accepter que la mission du repreneur, de ce nouveau gardien, n’est pas celle de créer, mais bien celle de marcher dans les pas de son prédécesseur pour d’abord faire perdurer.

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