Vidéo : Jaeger-lecoultre REVERSO Retournement de situation

Reverso. Un nom qui résonne dans la majorité des esprits comme familier. Le petit bijou de l’entreprise Lecoultre & Cie puis rapidement de Jaeger-LeCoultre a eu une histoire surprenante, pleine de bouleversements, tout pourtant partait d’une idée assez simple ! Signifiant littéralement “je me retourne” la Reverso a connu plusieurs phases, depuis son essor dans une période baignée d’art déco, jusqu’à un désamour après la Seconde Guerre mondiale pour enfin signer son grand retour dans les années 1970 et son explosion dans les années 1990 jusqu’à l’année 2021 qui marquait son 90e anniversaire, avec notamment la présentation de la merveille Reverso Tribute Nonantième, les années à venir nous surprendront encore sans aucun doute !

Jaeger-LeCoultre Reverso : les débuts

Nous sommes en Inde Coloniale en 1931, dans un club de polo britannique. César de Trey, citoyen helvétique, dans le secteur des prothèses dentaires quelques années auparavant, distributeur de montres de luxe et ami intime de Jacques-David LeCoultre, est alors de passage dans le pays pour affaires. C’est à l’issue d’une partie de polo que l’un des joueurs, officier de l’armée britannique lui montre son garde-temps au verre brisé et le met au défi de mettre au point un modèle suffisamment robuste pour survivre aux chocs occasionnés par la pratique du polo. Il faut savoir que César de Trey dans ces années là sera aussi celui qui distribuera la montre Ermeto en Europe.

De retour en Suisse, César de Trey confie la conception du mouvement à Jacques-David LeCoultre et celle du boîtier à l’ingénieur René-Alfred Chauvot, qui dépose le 4 mars 1931 un brevet pour une « montre qui coulisse dans son support et peut se retourner sur elle-même.». Grâce à ce mécanisme, le porteur du garde-temps peut faire pivoter le boîtier à 180 degrés pour protéger son cadran, principalement le verre. L’idée révolutionnaire est baptisée Reverso – littéralement « je me retourne » en latin – et manufacturée par Jaeger-LeCoultre. 

Les premiers modèles sont d’ailleurs expédiés en Inde pour y être testés par des joueurs de polo. La popularité du modèle dépasse immédiatement les frontières du monde du sport. Dès les années 1930, les clients peuvent choisir parmi des dizaines de modèles le cadran qui ornera leur Reverso. Si le noir, l’argent et le blanc sont évidemment plébiscités, d’autres teintes sont également prisées par quelques clients, comme le marron, le bleu et le rouge. Des cadrans fabriqués par Stern, grâce à une technique de peinture émaillée sur plaque d’argent.

Pour la petite histoire, avant de devenir le symbole par excellence de Jaeger-LeCoultre, ce design novateur a aussi été commercialisé par d’autres marques et sous licence, notamment Cartier, Hamilton, Favre-Leuba, et Patek Philippe avec son très rare modèle 106.

Le basculement protecteur du boîtier n’étant plus vraiment justifié loin des terrains de polo, le dos de la montre devient très vite un emplacement privilégié pour toutes sortes de gravures et autres décorations artistiques.

Jaeger-LeCoultre Reverso : la mal-aimée

Mais une deuxième carrière attendait la Reverso, qui allait bientôt se retrouver au front. En effet, malgré des problèmes d’étanchéité dus à sa conception – que la Maison reconnaîtra plus tard – , la Reverso est vantée comme « la montre idéale aux armées ».

Jusqu’à la guerre, et après la fusion de Jaeger et LeCoultre en 1937, pas moins de onze calibres sont conçus pour la Reverso. Cependant, la Seconde Guerre mondiale réduisit évidemment considérablement le commerce du luxe et après la fin de la guerre, le modèle connut malheureusement une désaffection complète.

La mode avait changé et était aux montres rondes. Si bien que le fabricant de boitier Genevois Wenger ira jusqu’à détruire une partie de l’outillage industriel de fabrication des boîtiers. Les rares demandes étant réalisées en utilisant le stock restant. Jusqu’à la fin les années 1960, la Reverso n’était plus que le symbole dépassé d’une époque révolue et semblait promise à une disparition certaine.

L’époque était au changement et au renouveau. L’horlogerie aussi avait besoin de symboles plus modernes, plus forts, et elle l’avait trouvé : la « Moon Watch », le chronographe Speedmaster d’Omega que la NASA avait choisi pour équiper ses missions spatiales… Celui qui allait bientôt faire ses premiers pas sur la lune.

Jaeger-LeCoultre Reverso : LA RENAISSANCE

Au début des années 1970 la Reverso n’est plus d’actualité. La Master Quartz de Jaeger-LeCoultre, ne déviant que de 5 secondes par mois, arrive, la crise du quartz aussi.

Ce n’est qu’en 1972 que le salut arriva en la personne de Georgio Corvo, distributeur italien de Jaeger LeCoultre. 

Giorgio Corvo sur la gauche. On reconnait sur la droite Gunther Blumlein. Photo citée sur A Collected Man, courtoisie de Jacopo Corvo.

C’est pourtant ce moment-là, en 1972 que Giorgio Corvo choisi pour commander à la manufacture l’intégralité des stocks de boitiers « nus » de Reverso restant, soit 200 pièces. L’histoire raconte (d’après Manfred Fritz, auteur de “Reverso la légende vivante”) que la Maison fut tellement surprise de la commande qu’elle demanda confirmation à trois reprises ! Il demande à la manufacture du Sentier si on peut y adapter un mouvement, la réponse est négative. En rentrant en Italie avec ses boitiers, il y intègrera un petit mouvement rond Jaeger-LeCoutre en cours de production. Un mois après les 200 sont vendues, et il revient en Suisse. L’Italie à l’époque, est un marché qui donne pas mal de tendances, horlogères en particulier.

Ce mouvement ovale adapté sera le 846, et il sera produit dès 1975 pour équiper la nouvelle Reverso. En gardant en tête que la nouvelle fabrication du boitier n’avait pas été aussi simple.

Vous connaissez la suite de l’histoire et le constant succès de cette icône qui fut depuis déclinée à foison en toutes sortes de complications possibles. Il a fallu pour cela l’intelligence de nombreux ingénieurs pour rendre plus moderne la Reverso, notamment au niveau de son étanchéité. On pense à Daniel Wild et à sa nouvelle conception de boitier. Lors que le brevet de René-Alfred Chauvot mettait en avant 23 composants, celui de Wild en possède 55.

Jaeger-LeCoultre Reverso : une montre CONTEMPORAINe

Les années 1990 sont le signe d’une très grande avancée pour Reverso. Il faut savoir qu’à ce moment, la grande complication, et surtout dans un boitier de forme, demande de se réapproprier des savoir-faire qui sont déjà en train de disparaitre. En partie parce que l’industrie suisse a été très marquée par la crise liée à l’essor du quartz en Asie.

On se souvient notamment, en 1991, du 60ème anniversaire de la Reverso, avec la présentation dans une édition limitée à 500 pièces de la Reverso « Soixantième », équipée du nouveau mouvement 824 dont la platine et les ponts sont en or, et pour la première fois visible par un fond transparent. Les années qui vont suivre nous dévoileront la première Reverso grande taille en 1992, en 1993 la Reverso Tourbillon ou encore la répétition minute en 1994.

D’ailleurs 1994 est aussi une date clé pour l’apparition d’une Reverso que nous voyons beaucoup aujourd’hui : la Duoface. Une pièce qui présentait lors de son introduction un second fuseau horaire avec indication du jour et de la nuit sur son dos, au lieu du classique fond plein.

Celles que vous pouvez voir dans cette vidéo ne sont autres qu’une Reverso Classic Duoface Small Seconds apparue en 2019, et une Reverso Tribute Duoface Small Seconds, dans le même esprit, néanmoins avec le dos blanc.

Enfin, en parallèle de la renaissance de savoir-faire et de l’apparition de complications sur la Reverso, les années 1990 signent le retour des métiers rares, et notamment de la peinture sur émail et des gravures au dos de la Reverso. On pense à des Reverso décorées de blasons, lettres, et autres signes distinctifs. Celui qui redonnera un souffle à ces métiers d’art s’appelle Miklos Merczel, un horloger Jaeger-LeCoutre amoureux de peinture qui créé ainsi en 1996 un atelier d’émaillage chez la marque du Sentier.

La Reverso était repartie pour un tour, et avec elle complications et diversité de décoration. 2021 nous a présenté son 90e anniversaire avec la présentation, notamment, de la Reverso Tribute Nonantième, magnifique pièce à heures sautantes, combinant à merveille tous les savoir-faire et les possibilités que la Reverso sous-entend. Sans parler des pièces exceptionnelles qui ont pu sortir des ateliers, je pense notamment à une certaine Gyrotourbillon ou Hybris Mechanica.

Longue vie à la Reverso !

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