Nomos Glashütte L'incroyable tour de force d'une jeune manufacture
Si vous nous lisez de temps en temps, vous aurez certainement compris que cohérence et authenticité sont deux notions que nous tenons toujours en haute estime lorsqu’il s’agit d’observer et de comprendre un objet, une personnalité ou une marque. Quoi que ce soit en fait.
Nomos fait aujourd’hui encore bien trop souvent, dans l’imaginaire collectif, figure de jeune frère gentil aux côtés des géants qui l’entourent. Think again.
Je me suis rendu il y a quelques semaines à Berlin, à Dresde et à Glashütte, à la rencontre de ceux qui ont créé la Tangente et font vivre une marque qui prouve plus que jamais que minimalisme n’est pas simpliste et qu’une vraie belle horlogerie peut rester accessible.
Voici le récit de ce que j’ai pu vu voir…
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Nomos Glashütte : des équipes tout aussi Bauhaus que les montres
Lorsqu’on arrive chez Nomos, que ce soit à Berlin ou à Glashütte, ce qui frappe instantanément, avant même de s’intéresser aux montres, est sans doute l’harmonie qui se dégage des équipes et des lieux de travail.
De la direction aux designers en passant par les équipes marketing et les relations presse : on est affuté, mais détendu. On fait souvent preuve d’une originalité très berlinoise qui encourage les personnalités à se faire voir. Attention, la rigueur, elle, reste germanique.
Si je n’ai pas eu l’occasion de m’entretenir directement avec Roland Schwertner, fondateur de la marque héritière du Bauhaus, j’ai pu prendre un café avec Judith Borowski, en charge de la stratégie de marque et discuter un long moment avec Uwe Ahrendt qui officie depuis 2000 en tant que CEO de la maison.
Je ne vais pas vous raconter ici en détails que le cake partagé avec Judith et les équipes de Berlin était “wirklich köstlich” (vraiment délicieux), ni de la simplicité avec laquelle je me suis retrouvé à débarrasser la table avec Uwe, mais ce sont pourtant là aussi des détails qui ont toute leur importance.
Une culture d’entreprise qui prône l’authenticité et la modestie et qui s’étend tout en haut de la pyramide de direction. En horlogerie ou ailleurs, ça ne se voit pas tous les jours.
Laissez-moi enfoncer le clou de la cohérence Nomos avec quelques mots sur le parcours et la formation de Uwe Ahrendt. S’il a étudié l’économie, il est aussi ingénieur industriel spécialisé en ingénierie de précision et fabrication d’outillages. Pas vraiment un col blanc qui vient de chez Procter & Gamble. Il est aussi horloger, comme l’étaient son père et son grand-père avant lui. Il n’a donc pas attendu que les grands groupes de luxe s’intéressent à l’horlogerie pour en connaître les rouages.
Mais ce qui nous aidera sûrement davantage à comprendre comment et avec quelle expérience préalable Uwe Ahrendt a pu construire une véritable manufacture en moins de 20 ans sont sans doute 6 ans passés en tant que directeur de production à la renaissance de la Manufacture A. Lange & Söhne dès 1994, de l’autre côté de la rue…
Vous voyez où je veux en venir ? On continue…
Un outil de production digne des plus grands
Mais c’est en pénétrant les différents sites de production que la claque fut la plus grande : ici, on n’exhibe pas d’horlogers aux cheveux blancs dans un chalet en lui faisant faire un peu de décoration, de l’assemblage ou du contrôle qualité. L’outillage présent sur site est ce qui se fait de mieux en la matière et similaire à ce que j’ai pu voir en visite en Suisse dans des manufactures dont les noms résonnent aujourd’hui pourtant beaucoup plus haut. Impressionnant.
Ce qui l’est encore davantage : les machines tournent, débitent et le personnel s’affaire. La cadence de production est élevée et ce n’est pas si surprenant lorsqu’on sait qu’en volume, Nomos est de très loin le premier producteur de montres mécaniques du pays.
Dans les bureaux de Recherche et Développement, là encore, pas moins d’une dizaine de personnes affinent les technologies existantes et pensent au lendemain avec plusieurs coups d’avance. Il n’y a pas de secret, c’est bien la seule manière en si peu de temps de construire un outil aussi abouti capable de produire son propre système d’échappement.
Alors ? Toujours une petite manufacture ? Pas vraiment, non.
Une véritable cohérence, sur toute la ligne
C’est donc ainsi que nous avons découvert l’envers du décor. Malgré la connaissance et la très grande appréciation que j’avais déjà de ces designs, des calibres et de la manière dont la barque se mène, je dois bien avouer avoir été surpris, très agréablement, par tous ces petits détails qui ne trompent pas et permettent à une petite entreprise née en 1990 de devenir en moins de 30 ans cette belle manufacture qui joue aujourd’hui d’égal à égal avec les poids lourds.
Voilà bien pour moi la preuve, une fois de plus que l’Homme est plus que jamais au coeur des belles réussites. La preuve que constance, fidélité à des valeurs et cohérence des produits font les grandes marques. Nomos imagine, développe et produit ses montres à Glashütte, certes, comme d’autres. Mais ce qui la différencie de bien d’autres marques est pour moi avant tout chose, cette envie de créer de belles montres pour ceux qu’ils aiment.
Loin de moi l’idée de devenir sentimental sans raison, mais lorsqu’on cède aux promesses de croissance de marchés lointains qu’on connaît mal et qu’on n’apprécie pas forcément… on a vite tendance à se perdre. C’est arrivé à d’autres.
Lorsqu’au contraire, on continue ici de créer pour sa famille, ses amis et son pays : on reste authentique. Ça se voit, ça se ressent, et ça se matérialise à travers une forte personnalité et par de très belles choses pleines de sens qui restent accessibles.
Le marché allemand l’a compris depuis longtemps, les U.S aussi. Ce n’est donc à mon avis qu’une question de temps avant que le reste du monde ne se rende compte de l’incroyable tour de force qu’est en train d’accomplir la jeune manufacture de Glashütte…